L’indignation intacte de Hessel

Publié le par ag94

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Votre dernier ouvrage « Indignez-vous ! » s’est déjà vendu à plus de 600.000 exemplaires et suscite bien des passions. Comment expliquez-vous ce succès de librairie ?

L’éditrice « d’Indigène » a eu la bonne idée de me faire dire des choses relativement courtes et percutantes. Elle les a présentées dans un format facile à distribuer. Ce petit livre attire à la fois ceux qui considèrent qu’il faut protester et ceux qui y sont opposés.

Vous dénoncez beaucoup de choses et vous appelez à la protestation…

C’est une idée à la Jean-Paul Sartre : il faut se mobiliser car beaucoup de choses peuvent paraître inacceptables. Je m’appuie sur deux grands textes : le programme du Conseil National de la Résistance qui disait déjà qu’il y avait des valeurs à défendre ; et on peut penser qu’elles ne le sont pas suffisamment aujourd’hui. Et la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme qui prescrivait tout un programme sur lequel je constate qu’on n’a pas beaucoup avancé. Et même que l’on a parfois reculé.

Par exemple ?

On parlait des féodalités économiques en 1943. Aujourd’hui, on parle de la financiarisation de l’économie dont on s’aperçoit qu’elle aboutit à une grave crise. On s’aperçoit aussi que notre planète est fragile. L’exploitation sauvage de certaines ressources a été exagérée, il est grand temps de s’indigner et d’essayer de protéger un peu mieux les ressources de la terre.

Pourquoi votre voix porte mieux que d’autres ?

Quand quelqu’un de 93 ans se met à râler, cela peut attirer l’attention. Le fait que j’ai eu une vie assez mouvementée avec l’expérience de la guerre ou des Nations Unis, fait que l’on pense peut-être, que j’ai quelques expériences intéressantes.

Vous avez milité, notamment au parti socialiste. Désormais vous portez les couleurs d’Europe Écologie. Pourquoi ?

Je trouve qu’il faut que le parti socialiste reste le grand parti de gauche et je reste très attaché aux valeurs du parti socialiste. Je suis un ami fidèle de Martine Aubry. Mais je pense que la notion « environnement » d’une part et la « dimension européenne » d’autre part sont des notions importantes à introduire dans la gauche française. La gauche a besoin d’une formation un peu plus impertinente. Notamment sur le plan de l’immigration, de l’ouverture européenne. Il y a là des choses à ajouter aux valeurs du socialisme.

Vous avez pris des positions contre la politique d’Israël à l’égard des Palestiniens. Comment a-t-on pu vous soupçonner d’antisémitisme puisque vous avez des origines juives ?

Mes opinions sont très favorables à Israël. J’ai toujours soutenu Israël comme un pays dont nous avons besoin qui a été créé heureusement après la shoah. Mais en même temps je suis très critique à l’égard de la politique menée par le gouvernement israélien notamment la colonisation et l’occupation qui sont à mon avis tout à fait contraires au droit international. Ma préoccupation fondamentale c’est le respect du droit international. Et je constate qu’il n’est absolument pas respecté ni par M. Netanyahu ni par l’ensemble du gouvernement israélien.

Que peut-on faire ?

Je dis dans le livre qu’il faut protéger les Palestiniens qui sont en situation terrible. Mon engagement à l’intérieur du tribunal Russell sur la Palestine montre que c’est une nécessité de mobiliser les citoyens pour qu’on ne continue pas à laisser impunies les graves violations des droits de l’Homme commises par le gouvernement israélien.

Comment voyez-vous 2012 ?

Je souhaite que la gauche retrouve enfin le pouvoir, une gauche véritable et constructive.

Propos recueillis

par Marcel GAY

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